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Je suis frappé ces derniers temps par l’évolution, plus ou moins assumée, d’une petite partie du milieu évangélique français vers un positionnement qu’on pourrait qualifier d’ « identitaire ». Minoritaires depuis toujours en France, les évangéliques n’avaient jusqu’ici, me semble-t-il, jamais été tentés par une vision « constantinienne » selon laquelle l’Etat se doit de défendre la foi chrétienne en tant que « religion officielle ». Nos ancêtres huguenots n’ont-ils pas été persécutés au nom de cette alliance entre pouvoir et religion ? Et en tant que chrétiens « professants », ne sommes-nous pas les premiers à affirmer avec force qu’on ne « naît » pas chrétien, mais qu’on le devient, et que la foi relève de la conscience plutôt que de la contrainte ?

Et pourtant… dans le contexte actuel de crainte de l’Islam, voilà que certaines voix se font entendre parmi nous pour dénoncer le prosélytisme musulman dans notre « terre de France », pour s’élever contre la construction de mosquées, et pour mettre en garde contre l’« islamisation » de nos sociétés. On croyait que la France s’adonnait plutôt au relativisme agnostique et à l’expérimentation sociétale… mais la voilà désormais, à en croire certains, proche de basculer dans le rigorisme religieux !

Qu’on ne se méprenne pas sur mon propos : en tant que chrétiens, nous ne pouvons évidemment pas souhaiter que l’Islam progresse. (Aux amis non-croyants qui seraient choqués par cette phrase, je réponds qu’eux non plus ne le souhaitent pas… ou alors je ne comprends plus rien). Pour nous, chrétiens, notre désir est que nos contemporains – musulmans et autres – puissent rencontrer et connaître Jésus-Christ, que nous confessons comme unique Sauveur et Seigneur. C’est l’ADN même de notre foi, le cœur de l’Evangile. De même, il est légitime et lucide d’être préoccupé de l’emprise croissante de l’Islam, voire du fondamentalisme musulman, dans certains quartiers. Comment, d’ailleurs, ne pas être bouleversés par, et déterminés face au terrorisme islamiste, qui menace bel et bien nos sociétés ? Je crois enfin qu’on peut, à bon droit, valoriser l’héritage spirituel de l’Occident et considérer qu’il est normal que notre calendrier s’inspire des fêtes chrétiennes et non musulmanes, qu’il est légitime aussi que les grandes valeurs judéo-chrétiennes (dont, précisément, la liberté de conscience) façonnent notre pensée et notre droit.

Mais si nous maintenons- comme nous l’avons toujours fait – que la foi est affaire de conscience et non de naissance ou de contrainte ; si nous nous croyons enjoints à aimer notre prochain, quel qu’il soit, comme nous-mêmes ; si, enfin, nous faisons confiance à Dieu pour que l’Evangile prévale sur toute autre vision du monde, comment pouvons-nous refuser à l’autre la liberté d’expression et de culte que nous revendiquons pour nous-mêmes ?

Il est paradoxal de voir des chrétiens qui s’élèvent – à juste titre – contre la privation des droits des minorités chrétiennes dans le monde mais qui, l’instant d’après, exigent qu’on s’oppose par la loi au prosélytisme musulman. Etonnant aussi de voir des évangéliques exiger un droit de parole, ou pester contre la laïcité quand elle nous vise, mais faire écho aux plus laïcards lorsqu’il s’agit de réduire au silence celui qui croit autrement. La liberté d’expression et de religion est la même pour tous ou n’existe pas. Faut-il le souligner encore, dire cela ne revient en aucun cas à relativiser la vérité de l’Evangile. Il s’agit simplement de veiller, en société, à ce que chacun puisse s’exprimer pour que ce soit la conscience et non la contrainte qui prévale. Or nous avons tout intérêt à ce que l’Evangile s’adresse aux consciences, car « c’est avec le cœur que l’on croit et que l’on parvient à la justice, et c’est avec la bouche que l’on affirme une conviction et parvient au salut (…) Ainsi la foi vient de ce qu’on entend et ce qu’on entend vient de la Parole de Dieu. » (Romains 10.10 ; 17)

N’ayons donc pas peur d’être cohérents. Soyons des passionnés de la liberté de conscience… pour tous. Il en va de notre conscience, justement… mais aussi de notre intérêt ! Car comment ignorer que nous serons toujours victimes collatérales des restrictions religieuses qui visent l’Islam ? Et surtout, soyons confiants : Dieu n’a jamais eu besoin du pouvoir politique ou de la contrainte pour se faire entendre.


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