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Moi, président de la République …

Lors du débat télévisé du 2 mai 2012 entre les deux candidats aux présidentielles, François Hollande a marqué durablement les esprits en répondant à la question : « Quel président comptez-vous être ? » par une anaphore constituée de cinq mots qu’il prononce à quinze reprises : « Moi président de la République… »  

En fait, il fait subtilement référence au discours d’investiture de Nicolas Sarkozy en 2007 où celui-ci répète vingt-sept fois : « Je veux être le président de la République qui… »

Chacun, par une mise en scène fine et une rhétorique murement réfléchie, insiste sur sa volonté de mener une présidence exemplaire. Que ce soit dans le domaine de la justice, le train de vie des gouvernants, le code déontologique des ministres et l’exclusion des conflits d’intérêts, chacun fait des promesses qui rivalisent avec les discours utopiques d’autrefois !

Oui, mais…

Alors que l’on se remet difficilement d’un scandale financier ou fiscal d’un député ou d’un ministre, d’autres  émergent, à tel point que l’on a l’impression d’assister à un effet de dominos ! À droite ou à gauche nous constatons la même dérive. Bien que chacun plaide l’erreur d’inattention, l’oubli ou l’ignorance, nul n’ignore que le problème de fond est la convoitise et l’appât du gain !

Et puis, qui peut rester indifférent au train de vie de nos dirigeants français? Malgré les grasses indemnités et les avantages en nature surprenants dont ils bénéficient, nous constatons qu’en ce temps de crise l’austérité ne caractérise pas les dépenses de nos élus mais semble être réservée aux contribuables. Voyager en train et en transports publics a cédé la place au jet privé ! Sans écarter la légitimité d’un tel moyen de transport pour certains déplacements il faut tout de même établir les limites et définir les critères !

Devant de tels excès et abus il faut éviter de tout diaboliser. Car nous sommes tous au bénéfice d’avantages inestimables et nous reconnaissons le besoin d’investir dans des secteurs comme le système hospitalier, l’éducation, la recherche, les forces armées, la défense nationale, la police et la justice ! 

Mais devant les excès d’une société démocratique, le peuple a le droit de demander des comptes, de dénoncer les statuts et les privilèges qui appartiennent à une autre époque et même de manifester son mécontentement. Le principe de la démocratie autorise de telles démarches. Ce même principe permet de voter contre les tenants du pouvoir et de les exclure lors des prochaines élections, que ce soit les présidentielles, les législatives ou les municipales ! Cependant, ce principe ne justifie en aucun cas la violence, l’anarchie et le refus de l’autorité, au contraire il l’exclut ! 

Et l’Évangile dans tout cela ?

L’un des textes bibliques les plus pertinents sur notre responsabilité en tant que citoyen est sans aucun doute celui de Romains 13.1-7. Dans ce passage Paul reflète les paroles de Jésus : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Mt 22.21). Curieusement, Paul aborde ce thème dans une lettre dont le thème principal est celui du salut ; manifestement il perçoit un lien évident entre l’Évangile et le devoir du citoyen, entre le chrétien et l’État !

Quelles sont les idées principales de ce passage ?

Paul affirme que toute autorité est instituée par Dieu et doit être respectée (Cf. Daniel 4.17).  De ce fait, il appelle le chrétien à se soumettre aux autorités et il donne au moins trois raisons :

  • Dieu a mis les autorités en place même si ceux qui exercent le pouvoir ne se rendent pas comptent qu’ils  rendent un service à Dieu (1).
  • Les autorités veillent sur la justice et sanctionnent le mal (3-4). Cela présuppose que les autorités ont une connaissance basique du bien et du mal, ce que Paul laisse entendre en 2.14-15.
  • La conscience (5). C’est un concept difficile mais il faut se rappeler que Paul s’adresse ici aux chrétiens. Le plus souvent le chrétien possède une meilleure compréhension des structures instaurées par Dieu que ceux mêmes qui gouvernent et, par conséquent, il cultive un bon rapport avec l’autorité dans ses choix et ses attitudes et cela par motif de conscience. Pierre semble se servir de la même logique lorsqu’il encourage la soumission même aux patrons difficiles – 1 Pierre 2.18-19.

Se soumettre aux autorités ?

Paul exige de la part  du chrétien plus qu’un assentiment intellectuel ou une reconnaissance « arrachée ». Il nous demande de craindre et d’honorer les autorités. La crainte est liée à la notion de la sanction suite à un délit et l’honneur est dû à celui qui s’acquitte de sa fonction de façon « honorable ». Certes, il faut éviter dans ce domaine un idéalisme démesuré en se souvenant que, nous aussi, nous sommes des êtres imparfaits et faillibles.   

Dans ce passage Paul fait une application particulière dans le domaine des taxes ou des impôts. Aucun gouvernement, aucune municipalité ne peut accomplir sa tâche sans les moyens financiers et humains. Le verbe utilisé par Paul est « rendre » plutôt que « donner » ce qui présuppose que les impôts soient versés en contrepartie de prestations. On est en droit de se demander si Paul n’était pas idéaliste par rapport aux autorités. Cela n’est guère possible car il ne se faisait aucune illusion concernant la nature tyrannique de l’empire et en particulier du côté imprévisible et sadique de l’empereur  en place à l’époque, Néron ! Qui, en lisant ce texte, ne pense pas à l’histoire récente avec Staline, Hitler, Pol Pot etc. ?  Faut-il encourager la soumission, le respect, l’honneur devant de tels despotes ?

L’exception, existe-t-elle ?

Il semble que Paul fait une distinction implicite entre la soumission et l’obéissance. Le plus souvent la soumission s’exprime par l’obéissance et parfois les deux idées se chevauchent (1 Pierre 3.1, 6 ; Hébreux 13.7). De toute manière, la soumission et l’obéissance se manifestent par une réponse à l’autorité. Cependant, la soumission est plus large et moins restrictive que l’obéissance. La soumission, le plus souvent, relève d’un choix et présuppose une relation de respect avec la personne en face. On en trouve l’illustration dans l’Écriture dans le rapport entre époux et épouse, entre parents et enfants entre maître et esclave, entre anciens et membres de l’Église. L’obéissance, par contre, est une réponse sans appel à des règles ou des ordres et ne requiert pas forcément une relation. On peut donc obéir sans forcément se soumettre ! L’idéal est lorsque la soumission librement consentie conduit vers l’obéissance joyeuse, ce qui est le cas de notre relation avec Dieu. 

Revenons à notre question. L’exception existe et cela se ressent dans la riposte de Pierre aux autorités de son époque : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes… » (Actes 5.29). Tout en étant respectueux et en honorant les autorités, il peut y avoir des circonstances où notre soumission ultime est à Dieu. Lorsque les exigences de l’État contraindraient le chrétien à approuver ou à adopter des idées ou des comportements contraires à l’Évangile cela peut entraîner un refus de soumission.

Cela peut être illustré dans la relation entre époux et épouse. Même si l’épouse est appelée à respecter, honorer et se soumettre à son époux, elle  peut refuser de s’engager dans une voie ou une activité qui est en contradiction avec la loi de Dieu et l’Évangile, tel le mensonge, une fausse déclaration des impôts… 

De tels choix sont plus fréquents dans certains pays qui ne jouissent pas des mêmes libertés que nous. D’ailleurs nous constatons ce principe de soumission limitée dans l’histoire de Daniel (1.3,6 ; 3.16-18 ; 6.11) où Daniel et ses compagnons ont refusé d’obéir au roi et aux autorités en place sans pour autant leur manquer de respect.

Moi citoyen des cieux et de la République …

Comme du temps de Paul, aucun système politique n’est parfait ou exempt d’erreurs. Ces erreurs sont parfois dues à l’ignorance ou aux choix des instances supérieures. Mais parfois elles sont motivées par l’ambition malsaine, le prestige ou la cupidité et dans ces cas nous pouvons légitimement interroger les décideurs, exprimer un désaccord, exposer le mal, et demander des changements. Ultimement, si la situation le justifie, nous pouvons, avec crainte et respect, revendiquer notre allégeance à Dieu plutôt qu’aux hommes, mais en acceptant les conséquences d’un tel choix ! En dernier ressort, le chrétien laisse la question de la justice à Celui qui règne sur toute autorité et qui juge justement.

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