Aidez TGC Évangile21 à équiper les croyants pour qu'ils restent fermement attachés à l'Évangile dans une culture qui change radicalement.

×
Parcourir

Les 3 dangers qui menacent la pensée chrétienne

Les Groupes Bibliques des Écoles et Universités de Suisse Romande ont adopté pour devise « Croire – Penser – Agir ». Cet article s'intéresse surtout à l'élément « penser ». Nous verrons à ce sujet trois dangers, trois modes de fonctionnement qui peuvent menacer le bon emploi de notre pensée, ainsi que quelques bases pour une pensée chrétienne.

Danger #1 : séparer la foi et la raison

En tant qu'étudiants, universitaires ou autres, nous avons tous un certain degré de réflexion et de rationalité dans nos cours, et celui qui chercherait à s'en passer en ferait vite les frais – les examens ne pardonnent pas. Cela étant, un premier danger consisterait à réserver la réflexion pour nos cours, nos disciplines académiques, et à basculer dans l'irrationalité dès qu'il s'agit de foi – ou du sens de la vie, de notre vie privée, etc. Chrétiens, nous pourrions le justifier en disant que notre foi est dans notre cœur plutôt que dans notre tête, que nous voulons être conduits par le Saint-Esprit plutôt que par nos raisonnements, et ainsi de suite. Mais cette tendance n'est pas propre aux chrétiens, l'ambiance relativiste de notre société pousse dans ce sens, et renoncer à une pensée cohérente pose moins de contrainte.

Cependant, la Bible nous invite à rechercher l'intelligence et la raison, comme moyens de comprendre la crainte de Dieu (Pr 2.1-6). Et par la Bible, Dieu a choisi de communiquer par une Parole, une communication intelligible qui doit passer par notre compréhension pour être reçue, sans que cela exclue les émotions ou l'« intime conviction ».

Danger #2 : instaurer une rupture entre la Bible et les autres sciences 

Un second danger est celui de faire bon usage de notre intelligence, mais en séparant complètement deux champ d'application : une réflexion cohérente basée sur la Bible, et une bonne compréhension de domaines séculiers. C'est une des « solutions » au sempiternel problème « science et foi », mais une solution fort peu satisfaisante, parce que la Bible comme les recherches académiques visent à parler du vrai monde, et qu'il n'y en a qu'un seul. Ce monde est complexe, des regards différents existent, ils se complètent peut-être, ou s'excluent, ou se corrigent mutuellement.

Mais refuser de les confronter revient à instaurer une rupture, à vivre une forme de schizophrénie où l'on adopte un regard radicalement différent sur le monde selon si l'on est en contexte de cours, d'Église, ou autre. Et c'est aussi un grand obstacle au témoignage, car dans ce fonctionnement on parle au gens d'un monde qui n'est pas le leur. Ce fonctionnement comme le précédent conduit à ne pas « aimer le Seigneur de toute notre pensée » (Mc 12.30).

Danger #3 : perdre la foi au profit des courants de pensées non-bibliques

Le troisième danger consiste à bien faire le lien entre la foi et les études, mais dans le sens d'une soumission de notre foi à nos études, en réinterprétant notre foi en fonction de notre discipline. Les différents modes de pensée séculiers sont généralement animés par une recherche de vérité, mais ils sont aussi basés sur certains présupposés et construits par des êtres humains faillibles, influencés par leurs goûts personnels, leurs ambitions et leur arrière-plan.

Se soumettre à la pensée séculière revient donc à devenir la proie d'une philosophie basée sur des traditions humaines et non sur le Christ. Paul nous met en garde contre ce danger en Colossiens 2.4-8.

Le fait que la réflexion rationnelle coupée de Dieu emploie des a priori discutables peut se voir quand l'on constate à quel point les visions du monde véhiculées par les différentes disciplines peuvent être incompatibles. Ainsi, sur la question de l'anthropologie, de qui est l'homme et de pourquoi il se comporte comme il le fait, il peut être difficile de trouver un dénominateur commun entre une vision sociologique qui met l'accent sur les déterminations sociales qui poussent l'homme à agir d'une manière, une vision biologique axée sur les fonctionnements neuronaux et hormonaux, un point de vue économique qui verra l'homme comme essentiellement rationnel et agissant pour son intérêt propre, sans parler des points de vue médicaux, physiques, etc.

De telles différences de présupposés peuvent conduire à des discussions où l'on a vraiment l'impression que deux personnes vivent dans des mondes différents, et cela peut être réellement le cas du point de vue de leur formation.

Une solution

Face à ces différents dangers, nous avons besoin de retrouver une pensée chrétienne, qui ne consiste pas à clore la discussion par un appel à la Bible, mais à bâtir nos réflexions à partir de présupposés bibliques, si possible en les confrontant à des chrétiens qui travaillent dans d'autres domaines sur la base de présupposés similaires.

Par présupposés bibliques, il faut comprendre des bases de réflexions basées sur l'Écriture, qui ne vont pas remplacer le travail de recherche, mais le fonder.

Donnons à titres d'exemples quelques présupposés de ce type :

– Un homme créé à l’image de Dieu, d'où existence d’une nature humaine commune à tous les hommes, qui ne dépend ni des races ni des capacités ni de l'ancrage social ; 

– Un homme fait pour vivre en relation avec Dieu, mais qui s’en est éloigné, d’où des facultés déficientes ;

– Un bien et un mal dont la définition sont extérieurs à l’homme, et qui ne sont pas seulement le fruit d’un consensus. Cela a un impact important sur le droit et l’éthique.

Ce genre d'indication ne donne pas un modèle de fonctionnement du monde dans son ensemble, et nous ne devons pas nous attendre à ce que la Bible nous en donne un, mais à l'aide de ce genre de principes nous pouvons avoir une réflexion qui sera en accord avec des convictions bibliques.

Lorsque par contre on constatera une divergence avec la science séculière, il ne s'agira pas tant de refuser les conclusions de celle-ci que de chercher au sein de sa démarche ce qui ne fonctionne pas, ce qui part d'un postulat arbitraire ou résulte d'une déduction abusive. Cela demande certes du travail, mais nous donnera d'autant plus de crédibilité dans l'interaction avec nos interlocuteurs non-croyants. 

Un encouragement 

Que faire donc de ces divers éléments ?

D'abord continuer à nourrir notre foi par une lecture intelligente de la Bible, qui détermine notre façon de voir le monde, nos émotions et notre manière d'agir. Cela ne signifie pas devenir un « cerveau sur patte », mais avoir une personnalité intégrée dans toutes ses dimensions.

Ensuite, la dimension du débat est importante, et trop souvent oubliée dans notre époque. Le débat permet de confronter des manières de penser, et tandis que chacun donne les raisons de sa vision, une meilleure compréhension peut se bâtir, et l'on est rendu attentif aux faiblesses voire aux failles de sa propre position. Débattre avec chrétiens, incroyants ou tenants d'autres positions est un enrichissement, et, contrairement au cliché véhiculé par l'idéologie de la tolérance, lorsqu'on le fait dans un bon esprit cela rapproche plus que cela ne sépare.

Et finalement, laisser la foi chrétienne, la Bible, la théologie et les différentes disciplines d'étude s'interroger mutuellement est tout l'esprit du projet Dialogue et Vérité. Ce projet des GBEU vise à réunir des groupes d'étudiants sur des sujet mettant en jeu une ou des disciplines académiques et la foi chrétienne, et tous les étudiants intéressés sont appelés à participer.


Cet article a été publié initialement dans À Propos, N°35.

EN VOIR PLUS
Chargement